Imaginez des athlètes comme Serena Williams, Maria Sharapova ou Anna Kournikova. Pourriez-vous imaginer que l’une d’entre elles souffre de dysfonctionnements du plancher pelvien ? Les statistiques du NCBI aux Etats-Unis (National Center for Biotechnology Information) montrent que 41 % des athlètes féminines d’élite souffrent d’incontinence à l’effort. Ce phénomène est généralement dû à la faiblesse des muscles du plancher pelvien. Comment des personnes en aussi bonne santé et en aussi bonne forme physique peuvent-elles souffrir d’une faiblesse des muscles du plancher pelvien ?
Le périnée, également appelé plancher pelvien, a tendance à être oublié et parfois malmené pendant la pratique d’activités sportives. C’est un sujet assez peu abordé dans les clubs ou les salles de fitness, et pourtant le sport peut avoir un impact négatif sur le périnée et à terme entraîner des fuites urinaires. Connaître le rôle et le fonctionnement du périnée permet de mieux comprendre en quoi certaines pratiques et habitudes sportives peuvent l’affaiblir.
Une étude intéressante sur le sport et le périnée
Une étude, réalisée en Mars 2018*, a consisté à comparer la force des muscles du plancher pelvien chez des athlètes de niveau compétition et des femmes non entraînées. L’exercice physique peut solliciter les muscles du plancher pelvien. De nombreuses femmes souffrent d’incontinence urinaire lorsqu’elles font de l’exercice ou du sport à haute intensité. Cette étude a examiné la force des muscles du plancher pelvien, l’incontinence urinaire chez des athlètes féminines (pratiquant notamment handball, football, gymnastique, badminton, BootCamp et CrossFit) et les femmes non entraînées. Les participantes étaient des femmes nullipares en bonne santé âgées de 18 à 30 ans.
Cette étude a montré qu’il n’y avait pas de différence significative dans la force des muscles du plancher pelvien des athlètes et des femmes non entraînées. Cela suggère que les muscles du plancher pelvien ne sont pas renforcés lors d’un entraînement général mais nécessitent des exercices spécifiques. Ceci est particulièrement vrai pour les sports à forte intensité physique. Les entraineurs sportifs, et les femmes elles-mêmes, doivent donc accorder une attention particulière à l’entraînement et au renforcement des muscles du plancher pelvien féminins (et aussi masculins !), afin de réduire l’apparition de l’incontinence urinaire.
Pourquoi le sport peut-il endommager votre périnée ?
Plusieurs facteurs de risques, seuls ou additionnés, favorisent l’affaiblissement de cet ensemble de muscles, ce qui augmente le risque d’incontinence à l’effort et au prolapsus (descente d’organes). Cette fragilité périnéale peut avoir différentes origines : un problème de tonicité du périnée, la pratique excessive de certaines activités physiques, et de mauvais gestes sportifs.
Le plancher pelvien est un groupe de muscles en forme de bol qui se trouve à l’intérieur du bassin. Sa fonction est de soutenir vos organes internes (utérus, vessie, rectum, intestins, etc.) et de contrôler vos muscles sphincters externes qui vous empêchent de fuir (c’est-à-dire d’être continent). Ils sont également impliqués dans l’activité sexuelle et l’accouchement. Lorsqu’une femme ou un homme participe fréquemment à des activités à fort impact, elle exerce une pression ou une force vers le bas sur son plancher pelvien.
En courant ou en sautant, vous pouvez imaginer que vos organes internes frappent constamment le plancher pelvien, ce qui peut entraîner un dysfonctionnement. Dans le cas d’activités telles que le soulèvement de charges lourdes, on s’efforce généralement de soulever la charge et on exerce une pression sur le plancher pelvien. Le fait de pratiquer ces activités de manière régulière ou fréquente peut très certainement avoir un impact négatif sur votre plancher pelvien. La Haute Autorité de Santé (HAS) considère que le sport intensif constitue un facteur de risque majeur d’incontinence à l’effort.
Le pire, c’est que dans la plupart des cas, les femmes ne se rendent pas compte que leur plancher pelvien est dysfonctionnel jusqu’à ce qu’elles deviennent incontinentes ou qu’elles aient un prolapsus qui commence à bomber l’ouverture du vagin.
Un périnée trop tonique peut également se fragiliser et ne peut plus assurer sa fonction de soutien correctement. Il peut ne plus absorber efficacement toutes les pressions, notamment pendant le sport.
Quels sont les sports à éviter ?
Les sports à éviter sont tous les sports qui augmentent la pression sur le périnée et qui par conséquent peuvent le fatiguer. On distingue deux types de sport à risque.
Les sports dynamiques avec impacts au sol
Les sports dynamiques avec impact au sol sont considérés comme des sports à fort impact. Par « impact élevé », j’entends les sports qui impliquent de courir beaucoup, de faire des sauts, de soulever des charges lourdes, des changements de rythme (accélérations-arrêts), des changements posturaux (pour les sports de balle en particulier) avec des accélérations ponctuelles.
- La course à pied,
- les sports de balle : le hand-ball, le basket-ball, le base-ball, le badminton, le volley, le tennis,
- les sports de glace : hockey sur glace,
- les sports de fitness/ cardio : le crossfit, le step, la Zumba, le Body attack, le Body Combat,
- la gymnastique,
- la corde à sauter,
- le trampoline.
Les activités sportives énumérées ci-dessus, dites à composante dynamique forte, peuvent, quand ils sont pratiqués en excès (3 à 4 fois par semaine en moyenne), générer à la fois une hyperpression abdominale et un étirement passif du tissu conjonctif et des fibres musculaires du plancher pelvien. Cela peut provoquer à terme une incontinence et un prolapsus.
Les sports de stabilisation
- Tous les sports de combat : judo, boxe, karaté,
- tous les sports de glisse : surf, planche à voile, kitesurf, ski,
- l’aviron,
- l’haltérophilie,
- équitation.
Les activités sportives ci-dessus nécessitent d’engager fortement le périnée pour permettre la stabilité dans la posture et dans le geste sportif. On identifie ici plutôt un risque d’hypertonie du plancher pelvien. Il devient alors trop tonique car il est trop utilisé en stabilisation et il devient alors moins mobile. Par la répétition, le périnée va se fatiguer peu à peu et celui-ci va perdre sa capacité naturelle à se contracter en anticipation de l’effort, amenant un risque d’incontinence. Cependant, ces sports de stabilisation présentent un risque de fragilisation du périnée moindre que les sports dynamiques.
Quels sont les bons réflexes pour protéger votre périnée pendant le sport ?
Il n’y pas vraiment de sport interdit, chaque corps est différent et tout le monde n’aura pas la même fragilité périnéale. Alors faut-il pour autant bouder tous ces sports ?
Ces sports peuvent être néfastes pour notre périnée parce qu’ils sont pratiqués trop vite ou trop fort et que nous surestimons nos capacités sportives. Il est important d’y aller très progressivement dans la mise en place de l’entraînement et respecter ses capacités, quels que soient son niveau et son sport.
Je ne dis pas que c’est une mauvaise idée de pratiquer l’un des sports énumérés ci-dessus, mais il est important de commencer par une bonne base : un tronc solide et fonctionnant parfaitement. Commencez par des exercices qui aident à maintenir ou à augmenter la force et la longueur de votre plancher pelvien. Alors comment faire pour créer de la force et de la longueur ?
Faites vos exercices de Kegel ! De nombreuses femmes ne savent pas vraiment comment faire leurs exercices de Kegel (exercices de contraction et de relâchement du périnée). Suivez tous mes conseils pour que je vous accompagne au mieux dans ces exercices ! Certaines femmes et surtout celles qui pratiquent des activités à fort impact, ont un plancher pelvien très serré et faible. Il faudra donc faire des exercices de relâchement et de relaxation des muscles du plancher pelvien avant de commencer à les renforcer.
De plus, de bons réflexes adoptés pendant la pratique sportive permettent de préserver son périnée en favorisant le travail des muscles profonds. Il faut porter une attention particulière à sa posture : on s’auto-agrandit, on stabilise son bassin et on expire naturellement pendant l’effort sans forcer. Après une grossesse, par exemple, on préférera des sports déjà pratiqués auparavant permettant ainsi de se concentrer plus facilement sur la zone pelvienne lors de la reprise.
Quels sont les sports à privilégier ?
La pratique de certaines activités sportives limite les risques pour le périnée. Les sports « amis » du périnée sont les suivants :
- le yoga,
- le Pilates,
- la natation (en dehors de la monopalme et de la nage papillon), privilégiez la brasse coulée,
- la marche, la marche nordique,
- le vélo elliptique,
- le golf,
- l’aqua-biking (en évitant de décoller les fessiers en danseuse),
- le roller.
Pour muscler son périnée, le sport le plus adapté est probablement le Pilates. Le principe de cette discipline est d’équilibrer toutes les parties du corps, de détendre les muscles trop tendus et de tonifier ceux qui ne travaillent pas assez tous les jours. En travaillant sur la posture et la respiration, les exercices de Pilates ciblent les muscles en profondeur. Grâce à cette pratique, vous allez engager le périnée. Vous travaillerez sur la respiration pour stimuler les muscles profonds et notamment le muscle transverse. Le Pilates est un excellent moyen de renforcer le périnée.
D’autres disciplines sont également intéressantes. Lorsque vous pratiquez des activités physiques, il est surtout important de « penser périnée ». Lorsque vous pratiquez de la gymnastique douce, du yoga, du renforcement musculaire, ou même de la marche, vous pouvez faire travailler votre périnée en le contractant plusieurs fois puis en le relâchant en lien avec les mouvements que vous faites. Le tout est d’y penser et de le relier à sa pratique sportive.
Pensez « périnée » lors de vos activités sportives !
Le sport, de manière générale, ne muscle pas spécifiquement le périnée. C’est la manière dont on réalise une activité physique qui nous permet de renforcer notre plancher pelvien. Que vous soyez un sportif(ve) passionné(e) ou un sportif(ve) du dimanche, la pratique d’une activité sportive ne peut être que bénéfique, rappelez-vous que votre périnée (chez les hommes et chez les femmes) est fragile et qu’il faut adapter votre activité, votre rythme, vos mouvements pour ne pas endommager votre précieux plancher pelvien.